9e 9bre 1763 à Ferney
Aimable peintre de la nature, vous avez la France et vous, tant de charmes l'un pour l'autre, que je serai mort avant que vous puissiez revenir en Italie et passer par mes petites retraittes.
Je ne vous ai point encor envoié les rêveries que J'ai imprimées sous mon nom, et qui courent le monde. La raison en est que je lis vos ouvrages, et que plus je les lis, moins j'aime les miens; mais aussi, je vous en aime d'avantage. Cependant, j'aurai l'honneur de vous paier mon tribut, tout indigne qu'il est de vous.
J'ai eu l'honneur de voir vos ambassadeurs vénitiens; sont venus sur ma Brenta. Je les ai reçu de mon mieux. Il me vient quelquefois des Italiens fort aimables, et ils ne servent qu'à vous faire désirer d'avantage. Je reçois quelquefois des nouvelles de vôtre ami le sénateur de Boulogne, qui est aussi le sénateur de Melpomène et de Thalie. Je vois qu'il est constant dans son goût pour le Théâtre, et que parconséquent Dieu le bénira toujours.
Vivez heureux où vous êtes, et quand vous repasserez les Alpes, souvenez vous qu'entre elles et le mont Jura il y a un bassin d'environ quarante lieues où demeure le plus constant de vos admirateurs, qui demande place au rang de vos amis.
V.