26 Juill: [1763] à Ferney
Vraiment, Monsieur, vous en parlez bien à vôtre aise, vous êtes à la fleur de l'âge dans le sein des belles lettres et des plaisirs, vos yeux sont éxcellenets, vous écrivez quand vous voulez, et moi, je suis un pauvre vieillard infirme, qui ai les neiges des Alpes sur la tête.
J'ai voulu jouer un rôle de vieux bonhomme sur mon petit théâtre, mais on ne m'entendait plus. Je suis obligé de renoncer à cet agréable amusement qui me consolait.
J'ai reçu aujourd'hui une Lettre de nôtre cher Goldoni, je me flatte toujours qu'il passera chez nous à son retour. Pour moi je suis toujours réduit à faire des souhaits impuissants. Il me vient souvent des Italiens, et des Anglais, la première question que je leur fais est pour savoir s'ils ont vu monsieur le Marquis Albergati. S'ils ne l'ont pas vu ils ne sont pas trop bien reçus. On dit que Mr Algaroti est malade à Boulogne, ce sont les deux ambassadeurs venitiens revenant d'Angleterre par Paris et par Genève, qui me l'ont dit; ils prétendent que sa maladie est très sérieuse; je suis très affligé de son état, et quoique je sois plus malade que lui, je vais lui écrire un petit mot.
Adieu, Monsieur, on ne peut être plus sensible que je le suis à vos bontés.
V.