aux Délices 15 xbre [1759]
Je me flatte mon divin ange que La mort funeste de la princesse que vous regrettez ne changera rien à votre destinée, et que votre place n'en sera pas moins pour vous une source de choses utiles et agréables.
Permettez moy de vous marquer toutte la part que nous prenons madame Denis et moy à ce triste accident. Je suis persuadé que Madame L'infante vous avoit bien goûté, qu'elle sentait tout ce que vous valez, et en ce cas vous perdez baucoup. Votre cœur sera affligé mais quoy que votre intérest ne soit pas pour vous un motif de consolation, il faut bien que vos amis envisagent cet intérest que vous êtes bien homme à négliger.
Voylà dit on de belles espérances de paix. Le roy d'Angleterre l'offre en vainqueur. Je ne veux point demander si cette déclaration de sa part est une suitte de certaines démarches. Je demande seulement comme citoyen si vous pensez que nous aurons la paix. Je la vois nécessaire pour nous. J'ay bien de la peine à la voir glorieuse, mais j'attends tout des lumières et de la belle âme de M. le duc de Choiseuil.
C'est alors que nous pourons mettre les chevaliers français sur la scène. Ils seront à vos ordres, comme l'autheur. Cette femme qui a raison me fait de la peine. On la dit imprimée, et très mal. C'est ma destinée, et cette destinée désagréable a été toujours la suitte de ma facilité. On ne se corrige de rien. Au contraire les mauvaises qualitez augmentent avec l'âge comme les bonnes. Que vous êtes heureux! et que cette loy de la nature vous est favorable! Je vous souhaitte et à madame Scaliger une jolie année 1760 et cinq ou six bonnes pièces nouvelles. Si j'avais du temps j'en ferais une, bonne ou mauvaise, mais Pierre m'appelle. Je ne connais que vous et luy.
V.
Je me flatte encor une fois que M. le duc de Choiseuil n'est pas mécontent de moy, et que vous fortifiez les bontez dont il m'honore. Je n'ay pas d'autre prétention.