18 auguste [1762]
Divins anges le bout de vos ailes m'est plus sacré que jamais.
Je vous remercie du batau; voylà ce qu'on peut donner de plus agréable à monsieur Tronchin. Je vous prie de joindre à touttes vos bontez celle d'ordonner à l'orfèvre d'envoier par la diligence son batau à mr Camp, banquier à Lyon, le quel mr Camp me le dépêchera sur le champ.
J'espère que je vous aurai bientôt une obligation encor plus grande, et que votre protection fera réformer l'abominable arrest de Toulouze. En vérité si le Roy connaissait les conséquences funestes de cette horrible extravagance il prendrait l'affaire des Calas plus à cœur que moy. Voylà déjà sept familles qui sont sorties de France. Avons nous donc trop de manufacturiers et de cultivateurs? Je soumets ce petit article à la considération de Monsieur le comte de Choiseuil. La France le bénit de travailler à la paix, mais Marie Terese poursuivra toujours Luc.
Catherine se joindra à Marie Terese, Don Carlos voudra délivrer don Jozeph du soin de régir la Lusitanie.
Cette pièce vraiment n'est pas aisée à faire et l'autheur y aura assurément bien de l'honneur. On luy battra des mains sur les bords de mon lac comme sur les bords de la Seine. Il daigne donc aussi protéger le tripot et les curez! Dieu le bénira. Il faut que nous luy ayons l'obligation à luy et à M. le maréchal de Richelieu d'être débarbarizés.
J'entends madame Scaliger à demi mot. Elle veut un Cassandre. Vous l'aurez madame, mais je doute que vous et mon autre ange veuilliez l'exposer au téâtre et à la dent des malins qui se moqueront de père Voltaire et du curé d'Ephese, et de ma relligieuse et de mon Cassandre duement confessé. Cependant je vous jure que le tout fait un effet auguste et terrible. J'en ay pour garants des huguenots qui se moquent des sacrements et à qui pourtant ma confession a fait grand plaisir. Enfin vous en jugerez. Je vous soumets tout ce que j'ay de sacré et de profane.
M. le maréchal de Richelieu vient il? Nous luy jouerons Cassandre.
Mille très tendres respects.
V.