1759-08-15, de Voltaire [François Marie Arouet] à Ami Camp.

Je joins, Monsieur, à tous les remerciements que je vous dois, tous les compliments que mérite un huguenot qui fait travailler des religieuses; ce qu'elles font pour l'amour de vous est bien édifiant; je ne doute pas que quelqu'une d'elles n'aille plus loin; c'est le vrai secret de raprocher les deux religions.
Les bonnes créatures travaillent à la fois pour Calvin et pour le Théâtre. Je viendrai à bout de tout avec leurs fleurs, celà ne doit pas coûter beaucoup, et quand l'académie de Lézine elle même aurait fait ma salle de Commédie, elle n'aurait pû être faite à meilleur marché.

Il y a longtemps que j'avais donné une Lettre de change d'environ 400£ à Mr le Président de Ruffey, j'avais oublié de mettre L'adresse de Messieurs Tronchin & Camp, il la mettra ou ne la mettra pas, celà est fort égal, vous n'en ferez pas moins honneur à ma signature.

Je voudrais que vous vissiez le grand Pictet de Varambé haut de six pieds sur mon théâtre de huit, relevé encor d'un panache d'un pied & demi; mais pour obvier à toutes ces difficultés je vous avertis que la scène est dans un entresol, tout est bon pourvù qu'on s'amuse. Cela n'empèche pas qu'on ne soit très affligé de nos malheurs, mais ils seront peut être réparés avant que la pièce se joue. Mille compliments à toute la société et à toute la famille.

V. t. h. ob. s.

Voltaire