1759-04-10, de Voltaire [François Marie Arouet] à Élie Bertrand.

Voicy mon cher ami votre brevet de lyonais.
Si vous voulez m'envoyez quatre lignes pr le secrétaireéternel tout sera dit.

On n'a pas pu avoir l'honneur de vous recevoir plustôt parce que l'académie n'est ressuscitée que depuis peu, et vous êtes le premier qu'elle adopte.

Je serais très surpris qu'il y eût un Boudon député des protestants auprès du roy. Il n'y a point de protestans en France aux yeux de la cour, il n'y a que des nouvaux convertis. On ne connaît pas plus de corps de protestants, que de corps de Turcs. Si par hazard il y en a dans les provinces on veut n'en rien savoir. Ny le clergé ny la noblesse ny le tiers état, ny les parlements n'ont le droit d'avoir un député résident à la cour.

Il se peut faire que quelques négociants huguenots aient imaginé de prêter 50 millions, et qu'ils aient envoyé Boudon pour cette affaire, mais je vous garantis qu'ils ne trouveront pas les 50 millions. Si je les avais, je ne les donnerais pas. Je souhaitte que Boudon réussisse, mais j'en doute.

On dit que les jesuittes ont fait révolter le Portugal contre le roy. Il le mérite bien pour avoir demandé la permission au pape de punir des sujets tonsurez et parricides.

Mille tendres respects à mr et me de Freydenrik.

La Saxe et le Portugal jouent un piètre rôle dans le meilleur des mondes possibles.