Ce 5 janvier 1759 des Délices
Je suis une paresseuse Monsieur et j'aurais dû vous répondre plus tos.
J'ai reçu vos deux lettres et quoi que je n'aie pas répondu à la première je vous jure que je songe à vous. J'en parle souvant à Mon Oncle et il me dit qu'il a écrit plusieur fois, qu'il ne se lassera point. Mais jusqu'à présant il n'y a point de plasse vacante chez l'électeur et malheureusement les temps ne sont pas favorables. J'espère cependand que les occasions à la fin se présanteront.
J'avais proposé à Mon Oncle d'essaier chez Mme de Gota. Si la guere finissait peut être cela deviendrait il praticable. Cette guere a épuisé les finances de la duchesse, elle emprunte de tout côtés et il est bien difficile de lui proposer d'ogmenter sa maison dans ce moment ci. Soiez sûre que je ne me lasserai pas, et que je voudrais de tout mon cœur être assez heureuse pour vous rendre service. Vous pouvez y compter. Mon Oncle est aussi dans ces dispositions et n'attand que l'occasion de vous donner des preuves de sa bonne volonté.
Mme la Comtesse de Bentin a passé trois mois en Suisse mais nous n'avons pu lui donner du goût pour ce païs là. Elle le déteste et sur tout Lauzane. C'est une femme charmente dont le caractère m'a paru exelant. J'ai passé avec elle des jours délicieux. Je sens que je lui serai attachée toutte ma vie.
Mon Oncle vient d'acheter deux terres dans le païs de Gex, l'une à forfait de Mr de Boisy, elle se nomme Fernex et Mon Oncle y va bâtir un beau château, l'autre à vie. Cette seconde se nomme Tournay et appartient au présidand de Brosses. Ainsi nous avons des maisons à Genève, en France et en Suisse. Mon Oncle a pris un goût si vif pour la campagne qu'il ne connais plus que ce plaisir là.
Adieu Monsieur, comptez sur l'envie que j'ai de vous obbliger et de vous convincre des sentimens avec les quels je suis Votre très humble et très obbéissente servente
Denis