1761-11-04, de Marie Louise Denis à Germain Gilles Richard de Ruffey.

Si Mon Oncle pouvait soubçonner Monsieur que j'usse paié trente pistolles a son inçu au président de Brosse je ne doute pas qu'il n'en eût été offensé.
Non seulement je n'ai pas voulu le risquer, mais je lui ai montré votre lettre. Il sent le motif qui vous l'a fait écrire, et en est aussi reconnoissant que moi.

Mais ce n'est point mon Oncle qui fait un procès au président de Brosse, c'est le président qui lui fait un procès pour douze moules de bois.

Je n'entre point ici dans le fond de l'affaire. Je sçai seulement que Mon Oncle après avoir été assigné, lui a offert de ne point plaider, et de prendre pour arbitres mr le premier président, mr le procureur général, et mr le Beau, Conseiller, ce que le présidand de Brosse a reffusé. Il me semble cependand que des arbitres de cette importance méritoient bien la Confience de Mr le président de Brosse, pour une affaire de 20 ou 30 pistolles. Mon Oncle lui dit, Si vous avez vendu votre bois avant la signature du Contrac de l'aquisition de Tournex, montrez moi cette acte de vente, et je voue paie celui que j'ai pris. S'il n'y a point d'acte de vente, tout le bois de la forais m'appartient du jour que j'ai acquis, par les Conventions du Contrac. Que peut on répondre à cela? Je l'ignore. Je déteste les procès, et je souhaiterais fort que le présidand de Brosse fût plus traitable. Tout le monde ne pense pas comme vous Monsieur, et personne n'a l'honneur de vous être plus inviolablement attaché que

Votre très humble et très obéissente servante

Denis

Permettez moi de faire mille tendres Complimens à Madame la présidente de Ruffey.

J'ajoute mes remerciments à ceux de madame Denis. Je ne crains point les fétiches, et les fétiches doivent me craindre. Il est clair que le fétiche en question a fait une vente simulée, et un magistrat m'a dit qu'un homme coupable de cette infamie ne resterait pas dans le corps dont est ce magistrat. Je ne présume pas que le parlement de Dijon pense autrement.

Y a t'il rien de plus simple que mon procédé? Si vous avez fait une vente réelle, je paye. Si vous avez fait une vente simulée, soyez couvert d'opprobre.

Adieu monsieur, votre belle âme doit être indignée, la mienne est à vous pour jamais.

V.

N. b. Il n'y a qu'une voix sur le fétiche.