1758-09-02, de Louisa Dorothea von Meiningen, duchess of Saxe-Gotha à Voltaire [François Marie Arouet].

Je suis incomodée et au lit depuis quelques jours, ce qui m'empêche d'être plus prolixe sur les affaires présentes.
Vous verés en attendent Monsieur par la feuille ci jointe que le Roi de Prusse vient encor de remporter une battaille sur les Russes. Si les détails qui s'y trouvent sont exagérés c'est de quoi je ne puis ni ne veus Vous doner la caution. Tout ce que j'aprendrai de plus circonstantié sur cet événement je Vous l'aprendrai. Selon toute aparence le mois que nous venons de comencer ne se passera pas sans battaille: il semble que la fortune ne soit pas encor décidée quel parti elle veut favoriser: depuis un An elle change du blanc au noir et du noir au blanc come une folle, sans que le plus clairvoyant Politique puisse prévoir de quel côté tournera enfin la balance. Ce qui n'est que trop palpable c'est que le fort come le foible se ruine égallement. Notre petit négoce avec Le baron de Grancour finira selon toute aparence plustôt que les troubles de cette funeste guerre. Je n'oublirai jamais l'amitié et le service que Vous nous avés rendus à cet égard. Conservés moi ce sentiment favorable et comptés autant sur ma reconoissance que sur mon estime. Le Duc, mes enfans, la Buchwald et moi nous Vous chérissons et admirons à l'envie les uns des Autres

LD