à Gotha ce 24 juillet 1767
C'est toujour avec un vrai ravissement que je reçois Monsieur Vos charmantes lettres, et que par concequend, je veus du mal à tout ce qui me prive de cette douce satisfaction.
Je suis très fâchée de savoir que Votre santé a eue part à Votre silence. Je fais mille voeux pour qu'elle se r'affermisse, et se conserve encor bien des anées. Les troubles de Geneve m'ont fait bien de la peine: je voudrois que tout le monde puisse jouir de la tranquilité, et du repos. Je ne conçois pas non plus coment l'on peut aimer le contraire. Je l'avoue que rien ne m'est aussi odieu que les tracasseriès, et les tripots. J'ai été extrêmement étonée, j'ose Vous le dire ingénument, mon cher et digne Ami de voir, et d'aprendre que nous soyons només le Duc, et moi, dans ce qui a paru dans le public contre la Baumelle, et sa chétive avanture; il s'est aussi adressé à moi, pour réclamer mon témoignage pour la défense de sa cause. Vous verés Monsieur par l'extrait ci joint ce que je lui ai fait répondre. Du reste je Vous prie et conjure les mains jointes, et très sérieusement, qu'il ne soit plus question du Duc, et moi dans toute cette affaire. Comptés Monsieur que cette defférence de Votre part, que Vous nous devés assurément, sera regardée par nous, come l'effet de cette amitié, qui de tout tems nous fut si chère, si flateuse, si prétieuse et que nous croyons mériter un peu par les sentimens que nous Vous portons. La chère grande maitresse qui Vous admire constament, et avec entousiasme, Vous chérit autant, et me charge de Vous en assurer. Enfin Monsieur que Vous dirai je? nous touts qui habitons le châtau du Friedenstein nous aprécions Votre mérite, et savons Vous rendre justice; je suis dans mon particulier inviolablement Votre amie et Votre servante
Louise Dorothee DdS