aux Délices près de Geneve [March/April 1758]
Vous me donnez Monsieur une extrême envie de vous obéir, mais vous ne pouvez me donner le talent de faire quelque chose d'heureux, qui remplisse votre idée, et qui plaise au public et à vous.
La langue française n'est guères propre aux inscriptions et aux épigrafes. Cependant si vous en voulez souffrir une médiocre à la tête d'un bon livre et au bas du portrait du duc de Rohan, en voici une que je hazarde uniquement pour obéir à vos ordres. Puisqu'il s'agit du petit pays, et de la petite guerre de la Valteline ne trouvez pas mauvais que je trouve le téâtre petit. C'est assez que votre héros ne le soit pas.
Vous voudriez sans doute de meilleurs vers, Monsieur, et moy aussi, mais il y a longtemps que j'ay renoncé à rimer. Une chose à laquelle je sens que je ne renoncerai jamais c'est aux sentiments d'estime que je vous dois et à l'envie de vous plaire; pardonnez cette courte prose et ces plats vers à un pauvre malade. J'ay l'honneur d'être bien respectueusement
Monsieur
votre très humble et très obéisst serviteur
Voltaire