aux Délices 4 juin [1757]
Je suppose monsieur que Mr Tronchin vous a payé votre bon vin dont je vous remercie, et que je bois à votre santé.
Je vous supplie de vouloir bien m'en envoier autant touttes les années, tant qu'il plaira à la nature de me permettre de boire.
J'ay la fantaisie de cultiver dans mon terrain hérétique quelques ceps catholiques. Seroit ce prendre trop de liberté que de m'adresser à vous pour avoir deux cent pieds des meilleures vignes? Ce n'est qu'un très petit essai que je veux faire. Je sens combien ma vilaine terre est indigne d'un tel plan, mais c'est un amusement dont je vous aurais L'obligation.
Je m'y prends à l'avance pour obtenir cette faveur. Aussi le principal objet de ma lettre est de vous remercier du fruit de la vigne que je vous dois, plustôt que de vous demander des vignes. Je vous prie de prendre très sérieusement mes remerciments, et de ne vous moquer que le moins que vous pourez de ma proposition.
J'ay l'honneur d'être avec tous les sentiments que je vous dois
Monsieur
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire