1757-07-03, de Voltaire [François Marie Arouet] à Antoine Jean Gabriel Le Bault.

Je vous demandais Monsieur avec humilité deux cent seps de vigne, sentant parfaitement combien ma terre mauditte, mon vigneron et moy, nous sommes indignes d'une telle faveur.
Vous daignez m'en faire parvenir davantage.

Dii melius fecere, bene est, nihil amplius opto.

Je ne prétends pas faire cent bouteilles de vin, d'un bourguignon allobroge. Je ne veux que plaisanter avec mon terrain calviniste. Le territoire payen des hottentots est un peu plus béni de Dieu, c'est là que les vignes de Bourgogne se perfectionent, mais nous ne sommes pas dans notre Allobrogie au trente quatrième degré de latitude comme le cap de bonne espérance. Puisque vous avez Monsieur la condescendance de vous prêter à mes fantaisies, j'attendrai vos bienfaits mais vous voudrez bien que je vous supplie de permettre que je paye les ceps et la peine de ceux qui les auront déplantez. Il est bien doux de s'occuper de ces amusements tandis qu'on s'égorge sur terre et sur mer, que l'Allemagne s'épuise de sang, et la France d'argent.

Je présente mes respects à madame Lebeau et j'ay l'honneur d'être avec les mêmes sentiments,

Monsieur

Votre très humble et très obéissant serviteur

V…