à ce 19 avril 1757
Pour le coup Monsieur il n'y a pas de ma faute si j'ai manquée à Vous répondre plus tôt à Votre aimable lettre du 26 du mois passé: il n'y a que deux jours qu'elle m'est parvenue et que par concequand j'ai eue la satisfaction de la lire et de l'admirer: bien des choses Monsieur se sont passées depuis, et ce ne sont que les événemens qui détermine le tems.
Le pauvre Amiral Bing a subi son malheureu sort malgré toutes les peines que les coeurs bienfaisants se sont donés pour le sauver: il y a même de l'aparence que cette lettre du Duc de Richelieu a produit un effet contraire à celui que l'humanité se proposoit: en attendent il est toujour beau, et digne de louange ce que Vous avés fait en faveur de cet Amiral, et j'avoue que je Vous envierai même cette démarche si le succès avoit répondus à Votre attente.
Les François sont assurément en grand nombre, car selon le dire de tout le monde leur Armée est composées de plus de cent mil homes. Actuellement ils se sont déjà emparés du Pais de Cleve sans faire d'autre mal encor aux habitans que de leur demander des contributions: la destination du reste de cette Armée et de quel côté elle tournera, c'est ce que nous ignorons encor très parfaitement. Le Roi de Prusse en attendent à ce que l'on prétend, est préparé à toute attaque. Il joue gros jeu et a des Enemis execescivement formidables à combattre: le voilà seul contre trois Puissances: il lui faut toute sa Sagesse et tout son courage pour résister à un pareil nombre et plus que tout cela pour vaincre. Toute l'Europe a les yeux fixés sur cet objet, tandis que le Conseil Aulique s'ocupe à tout préparer à mettre ce Roi au ban de l'empire. Je souffre beaucoup en attendent de meaux de gorge accompagné d'un gros Rhume. La Comtesse de Bruhl, feme du Ministre, a été arêtée et puis relâchée et envoyée en Pologne: l'on dit qu'elle a mitonée la révolte et la désertion de Plussieurs Régiments Saxons: on a ôté la garde suisse à la Reine et obligé le Prince Electoral et toute sa famille à se loger au château et quiter ainsi son Palais. Le Comte de Wackerbart a été arêté aussi et transporté à Kustrin, fortresse du Roi de Prusse. Tous ces événemens n'acheminerons pas la Paix dont pourtant la pauvre Patrie a tant besoin. La subsistance manque partout et la disete est générale. Dieu veuille avoir pitié de ceux qui n'ont nulle part à ce remuménage.
Conservés moi Monsieur Votre souvenir et soyés persuadés de l'estime infinie avec la quelle je suis
Monsieur
Votre très affectionée amie
Louise Dorothee DdS
L'aimable Buchwald et toute ma famille Vous ambrasse bien tendrement.