ce mardi [16 December 1755] au soir
Notre Corp est à Lauzane et notre Coeur à Geneves.
Cependand nous sommes très contans des gens du païs, mais les Delices, les Delices! Il y a un bailly aimable qui nous comble d'amitiés, mais les Delices! On vient nous voir malgré le mauvais temps et une montagne qu'il faut dessendre, mais les Delices! et sur tout les personnes qui nous font l'honneur d'y vennir nous intéressent bien davantage.
N'oubliez pas une femme qui vous aime de tout son cœur.
Notre habit est il fait? aurez vous la bonté Monsieur de me l'envoier? peutêtre le receverez je demain. Si vous n'aviez pas pu me l'envoier par le carosse d'aujourdui je vous prie de le donner bien embalé au porteur de cette lettre, qui revient à Monrion.
Souvenez vous d'une solitaire qui vous est bien tendrement attachée. Mon Oncle partage mes sentimens mais je ne vous dis rien pour lui dans ce moment ci, car il ne sait pas que je vous écrit, àccause de l'habit qui est encor un secret pour lui.
Permettez moi Monsieur de faire mille tendres complimens à madame Tronchain.