1754-12-14, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jacques Abram Elie Daniel Clavel de Brenles.

Vous voyez monsieur que j'ay pris mon plus long pour venir vous voir et pour vous remercier de touttes vos bontez.
Me voicy dans le château de Prangin avec une de mes nièces; et je viendrais sur le champ à Lauzane si je n'étais retenu par un rhumatisme gouteux pour le quel je compte prendre les bains d'Aix en Savoye. Je compte qu'enfin je pourai jouir de la satisfaction après la quelle je soupire depuis longtemps. Je pourai jouir de votre société et être témoin de votre bonheur.

Il me semble qu'Alaman n'a point été vendu. Mais ce n'est point Alaman, c'est vous monsieur qui êtes mon objet, je cherche des philosofes plutôt que la vue du lac de Lauzanne, et je préfère votre société à touttes vos grosses truites. Il ne me faut que vous et de la liberté. Je présente mes respects à madame de Brenles, et je suis avec plus de sensibilité que jamais

Monsieur

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

Madame Denis partage tous mes sentiments et vous présente à tout deux ses devoirs.