de mon lit à Lyon 4 xbre 1754]
Mon cher ange votre consolante lettre adressée à Colmar est venue enfin à Lyon calmer une partie de mes inquiétudes.
Vous aurez tout ce que vous daignez demander: et je ferai tout transcrire pour vous dès que je serai quitte d'une goutte sciatique qui me retient au lit. J'éprouve tous les maux à la fois, et je perds dans les voiages et dans les souffrances un temps prétieux que je voudrais employer à vous amuser. Il me semble que je suis las du public, et que vous êtes ma seule passion. Je n'ay plus le cœur au travail que pour vous plaire. Mais comment faire, quand on court et quand on souffre toujours? On veut àprésent que j'aille aux eaux d'Aix en Savoye pour le rumatisme gouteux qui me tient perclus. On m'a prêté une maison charmante à moitié chemin. Il faudrait être un peu plus sédentaire. Mais je suis une paille que le vent agite et madame Denis s'est engoufrée dans mon malheureux tourbillon. J'attends toujours de vos nouvelles à Lyon. On dit qu'on va jouer enfin le Triumvirat d'un côté et Pandore de l'autre. Ce sont deux grands fléaux de la boete. Hélas mon cher et respectable amy, si j'avais trouvé au fonds de cette boete l'espérance de vous revoir je mourrais content. made Denis vous fait mille compliments. Je baise en pleurant les ailes de tous les anges.
V.