1749-06-30, de Louisa Ulrica, queen of Sweden à Voltaire [François Marie Arouet].

A notre Apollon.

Je crois qu'il m'est permis de répondre aux vers galants d'un être que vous savez que je crois fort approchant de l'intelligence des anges.
Vous autres habitants des cieux, je vous trouve fort dangereux pour les mortels.

De l'esprit redoutons l'empire;
D'un amant tel que vous le prestige est trop fort;
Il séduit l'âme, étonne, et tandis qu'on admire,
Le cœur est sans défense, et la raison s'endort.
La vierge même, on nous l'atteste,
Céda contre un esprit céleste.

Je ne sais si on peut dire: céder contre, mais n'importe, si je ne parle pas français, du moins j'entends fort bien le vôtre, et je vais relire encore Sémiramis. L'instruction que vous donnez à votre cardinal m'a fait grand plaisir.

Je crois que vous avez des relations à Berlin; si vous envoyez un paquet, je vous prie de m'en faire avertir; je ferais tenir en même temps à m. Algarotti quelque chose qu'il me demande qui est trop gros pour la poste. Ne vous croyez pas obligé à me répondre à ce billet, c'est bon pour moi qui ne peux rien faire; mais vous, monsieur, qui pouvez toujours, faites des tragédies et laissez moi dire.