1748-10-19, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Je reçois dans ce moment un très beau mémoire de M. le coadjuteur, apuyé d'un mot de M. Dargental.
Je ne peux répondre dans ce moment que par les plus tendres remercimens. Je n'épargnerai pas assurément mes peines pour mériter des bontés si continuées, si vives et si encourageantes. J'avois encor par la dernière poste envoyé de la Malgrange quelques rogatons. Mais tenons tous cela pour non avenu, et attendons qu'après avoir travaillé à tête reposée je vienne travailler sous vos yeux à Paris vers le milieu de décembre. Les travaux les plus difficiles deviennent des plaisirs quand on a pour critique des amis si tendres et si éclairez.

Je vais écrire à M. le duc Daumont et après cela je ne quitte pas Semiramis.

Je suplie qu'on présente un mémoire à mr de Maurepas, et un à M. Berrier pareil à ceux qui sont destinez aux premiers gentilshommes de la chambre. Il seroit bon d'en ramentevoir les comédiens qui rarement songent à leurs quoyqu'ils les aiment, et qui ont bien besoin d'être conduits. Je suis honteux de tant de peines que je donne. Non il n'y a jamais eu d'hommes sur la terre comme vous autres et qui sent cela comme moy?

V.