à Commercy 12 août 1748
Je ne sais monsieur comment va votre santé, mais j'apprends que vous faites plus de bien à Semiramis que les eaux ne vous en ont fait.
Voici je crois mes deux anges gardiens de retour à Paris, vous aurez donc la bonté de faire le troisième. Je vous rends de très humbles actions de grâces; cela est bien beau de protéger les orphelins. Le père de Semiramis mourrait de peur sans vous. Je défie l'ombre de Ninus d'avoir l'air plus ombre que moi. Je crois que la peur m'a encore maigri. Je ne reprendrai des forces que lorsque j'apprendrai que mon enfant se porte bien. Je viendrai assurément vous remercier de la victoire, mais je ne hasarderai pas d'être présent à la défaite. Quoi qu'il arrive, je serai toute ma vie monsieur avec la plus tendre et la plus respectueuse reconnaissance, votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire
P. S. On dit que vous logez près de mes confrères les incurables, mais je me flatte que vous ne l'êtes pas. Les murs de Thebes et de Babilone ne sont plus, mais mon cœur restera inébranlable à l'amitié qu'il vous porte.