ce 2 avril [1739]
Mon cher confrère en Apollon, mon maître en tout le reste quand viendrez vous voir la nimphe de Cirey, et votre tendre amy?
Ne manquez pas je vous prie d'aporter votre dernière épître. Madame du Chastelet dit que c'est moy qui l'ay perdue, moy je dis que c'est elle. Nous cherchons depuis huit jours. Il faut que Bernoulli l'ait emportée pour en faire une équation. Je suis désespéré mais vous en avez sans doute une copie. Je suis très sûr de ne l'avoir confiée à personne. Nous la retrouverons, mais consolez nous. Ce grand garçon d'Arnaud veut vous suivre dans vos royaumes de Champagne, il veut venir à Cirey. J'en ay demandé la permission à madame la marquise, elle le veut bien; présenté par vous il ne peut être que bien venu. Je seray charmé qu'il s'attache à vous. Je suis le plus trompé du monde s'il n'est né avec du génie et des mœurs aimables. Vous êtes un enfant bien charmant de cultiver les lettres à votre âge avec tant d'ardeur et d'encourager encor les autres. On ne peut trop vous aimer. Amenez donc ce grand garçon. Madame du Chastelet et me de Chambonin vous font mille compliments.
Adieu jusqu'au plaisir de vous embrasser.
V.