1738-06-05, de Voltaire [François Marie Arouet] à Bonaventure Moussinot.

En réponse à celles du 31 may et 2 juin.

J'ay reçu mon cher amy la rescription de 2000lt.

Je vous renvoye le mémoire du miroitier.

Je vous prie d'envoyer toujours à bon compte les livres bien encaissez par les rouliers, à mesure que vous en aurez. Je suis bien charmé d'avoir enfin les transactions de Londres. Praut me fournira aussi Hugens de horologio oscillatorio. Je vous prie d'insister sur toutes les bagatelles que je luy demande.

Il viendra vous voir un jeune homme nommé monsieur Cousin qui travaille actuellement chez l'abbé Nolet, et qui viendra bientôt à Cirey ou j'espère luy faire un sort agréable. En attendant je vous prie de luy donner vingt pistoles, et de le bien encourager. Il a une belle main, il dessine, il est machiniste, il étudie les matématiques, il s'aplique aux expériences, il va aprendre à opérer à l'observatoire. Si Darnaud avait de pareils talents, je l'aurois rendu heureux, si même il avoit eu le courage de se former à écrire. Je croiois avec raison qu'il savoit l'italien, puisqu'il avoit fait imprimer dans le mercure une apologie du Tasse et je luy proposois de traduire un ouvrage qui luy eût procuré cent pistoles, et un voiage agréable de trois ou quatre mois. Praut devoit l'imprimer, luy donner les 100 pistoles, et luy payer son voiage d'avance. Le pauvre garçon sera bien malheureux s'il ne sait que faire des vers, et s'il ne se met pas à travailler utilement.

Je vous renverray bientôt la transaction de du Moulin avec un transport, et on poursuivra Demoulin vivement en un autre nom que le mien.

Je vous suplie si vous trouvez quelque petite montre jolie, bonne ou mauvaise, simple, d'argent seulement, mais surtout, petite, avec un joly cordon soye et or ou or trait, trois louis tout au plus doivent payer cela, je vous demande en grâce de me l'envoyer par le coche subito, subito. C'est un petit présent que je veux faire au fils de mr le marquis du Chastelet. C'est un enfant de dix ans, il la cassera, mais il en veut une, et j'ay peur d'être prévenu.

Le petite boete d'or émaillé est un des jolis bijoux que je connaisse, il a réussi comme votre cachet. En vous remerciant bien de tant de soins. Je n'ay point encor fait usage de la pendule à secondes; madame du Chastelet m'a pris tout mes ouvriers, et ma gallerie n'est pas finie.

Encor un petit mot sur les livres que vous m'envoyez. Vous pouvez fort bien dépêcher les 13 tomes d'observations. Praut reprendra les 4 qu'il a déjà envoyez et qui sont brochez. Je vous prie de luy bien recomander de faire retoucher cette mauvaise estampe. Que Latour choisisse