1738-07-21, de Voltaire [François Marie Arouet] à Bonaventure Moussinot.

En réponse à votre paquet du 19 mon cher amy.
Je vous renvoye la préface de mr d'Arnaud. Je vous prie de luy mander sur le champ de la bien copier sur du papier honnête, et de tâcher s'il se peut de L'écrire d'une écriture lisible. Après quoy il vous la remettra, avec un mot d'avis qu'il écrira aux libraires de Hollande.

à mrs Vestein et Smith, libraires à Amsterdam

Ayant apris messieurs qu'on fait à Amsterdam une très belle édition des œuvres de Mr de Voltaire, je vous envoye cet avertissement pour être mis à la tête. Je l'ay communiqué à mr de Voltaire qui en est content. Je ne doute pas messieurs que d'aussi fameux libraires que vous n'aient part à cette édition, ainsi je m'adresse à vous sur votre réputation et si ce n'est pas vous qui faites cette édition je vous prie de rendre cette préface à ceux qui sont chargez d'imprimer ce livre qu'on attend avec la dernière impatience.

Vous aurez la bonté de faire mettre le tout à la poste à l'adresse de Mrs Vestein et Smith, Amsterdam, et vous me renverrez le brouillon corrigé que je vous envoye.

J'ai reçeu le télescope, et les pantoufles. Le télescope est très bien racomodé, et ces pantoufles sont fort bien faites. Mes pieds et mes yeux vous sont fort obligez. Envoyez moy encor quand il vous plaira trois paires de ces belles pantoufles.

Le procédé de Dumoulin est d'un coquin, et celuy de la Marre d'un grand étourdi. Je veux absolument que Dumoulin paye au moins 1000lt ce mois d'aoust, et qu'il donne des sûretez pour les 2000 restans, c'est ce qu'il faut que le procureur luy fasse dire, et cela à condition qu'il me demandera pardon de l'insolence qu'il a eue de me menacer d'un mémoire. Sans ce préalable, je veux qu'on le poursuive à la rigueur.

A L'égard de Mr d'Auneuil, voicy ma lettre à mr votre frère, il la luy montrera. J'insiste sur la délégation des maisons. Il le faut absolument. Il est trop dur de Valeter pour son payement.

Quand on viendra de la part de Vidal, dites qu'il envoye reprendre la montre à Cirey. L'autre petite montre que vous avez envoyée a fort bien réussi.

Je vous remercie d'avoir bien choisi le fondé de procuration pour transiger avec Mr de Richelieu. Je conviens qu'en avril 1738 on me doit 3 ans, mais sur ces 3 ans qui montent à 12000lt

on a donné 2400
m r de Richelieu m'en a donné je crois, mille écus 3000
5400
resteroit à payer 6600, et le courant.

Je vous ay écrit au sujet du sr Dupuis, libraire, qui doit fournir pour environ 80lt de livres, en lui rendant son billet qui est je croi de 96lt. Il doit être content de mon procédé.

Deplus il poura me fournir des livres que je luy payeray comptant par vos mains si vous le trouvez bon.

Je suis bien mécontent de la négligence de Praut qui ne me fournit jamais les journaux ny ce dont il est convenu, à temps.

Je vous prie de faire venir chez vous le chev. de Mouhi, et de luy demander naturellement ce qu'il faut par an pour les nouvelles qu'il fournit et ensuitte je vous diray ce qu'il faudra donner àcompte. Il pouroit peutêtre se charger d'envoyer les mercures et pièces nouvelles.

A propos de pièces nouvelles je vous prie de m'envoyer une rescription de 4000lt, et sur ce je vous embrasse du meilleur de mon cœur.

V.

Je prie mr votre frère de souscrire de ma part pour le livre de M. de Bremont . C'est une traduction des transactions philosophiques. Il y a déjà deux tomes d'imprimez. Je prie qu'on les achète, et que Mr Bremont puisse savoir que je suis un de ses partisans.