3 juillet [1738]
Je reçois dans le moment deux lettres de vous mon cher abbé, du 28, et du 30 juin.
1º à L'égard de mr l'abbé Nolet, quand je vous ay prié de luy donner douze cent livres, et de le payer comptant outre cela, il n'y avoit nulle équivoque, car je voulois luy donner douze cent livres d'avance, et luy donner de plus le prix de tout ce qui sera prest, et que je compte qu'il m'enverra au commencement du mois d'aoust par Mr Cousin. Ainsi, vous m'auriez fait un plaisir très sensible de luy faire donner ces 1200lt d'avance.
Je serois d'ailleurs très fâché qu'il me fît un envoy sitôt. Je ne veux rien recevoir qu'avec mr Cousin et j'espère recevoir Baucoup. Donnez luy donc les 1200lt mon cher amy, et suppliez le de ma part de tenir prest pour la fin de juillet un envoy de plus de quatre mille livres s'il se peut. J'attends un petit mémoire de sa part. Faites luy je vous prie les compliments les plus sincères.
2º je vous ay écrit plusieurs lettres aux quelles je me réfère entièrement touchant mes affaires.
3º ne sachant si vous étiez à Paris j'ay envoyé à mr Cousin un mémoire détaillé de tout ce qu'il convient de faire au sujet des envois des Eléments de Neuton. Je prie mr Cousin de bien examiner tous les exemplaires que j'achette, et de voir s'ils sont tous entièrement conformes à mes intentions. Alors nous donnerons de L'argent à Praut en diminuant les prix des livres doubles qu'il m'a fournis, et qui luy sont renvoyez. Il ne luy reviendra pas la somme qu'il demande. Il veut me vendre les exemplaires brochez 3lt, après les avoir promis à 30 sous au prix coûtant. Cela n'est pas bien.Vous pouvez luy donner toujours 500lt àcompte.
3º Le billet au porteur, que je veux n'être payé que dans Décembre n'est point un billet valeur reçue, c'est une prière à vous, faitte, de ma part, de donner 840lt, sans spécifier le temps, et comme j'ay des raisons essentielles de ne donner cet argent qu'en décembre vous pouvez assurer de ma part le porteur, tel qu'il soit, que ce billet fait à un juif nommé Vidal, non nommé dans le billet, ne sera certainement payé qu'en décembre.
4º j'ay fait partir la montre aux diamans, avec des parchemins concernant Dumoulin par le carosse de Bar sur Aube hier à midy, et ne sachant si vous étiez à Paris, j'en ay donné avis à mr Cousin, qui demeure rue st Denis vis à vis le gr. chastelet chez mr Harny.
5º je vous prie d'écrire au grand Darnaud de rendre son avertissement quatre fois plus court, et plus simple, d'en retrancher les loüanges que je ne mérite pas, et de laisser dans le seul feuillet quarré de papier qui le contiendra, une marge pour les corrections que je feray.
Je vous réitère encor mon cher abbé que je vous supplie de donner douze cent livres à mr Nolet, pour mon compte et de L'assurer qu'il aura tout l'argent d'avance qu'il voudra. Adieu, je vous embrasse.
Cirey à ce 3 juillet 1738
Voltaire
J'ay peur que mr Nolet ne soit un peu fâché. Faites luy mille amitiez.
Mr de Latour, le peintre, doit vous venir voir au sujet de mon portrait. Je vous prie de faire généralement tout ce qui poura luy faire plaisir. Il veut exposer le pastel qu'il en a gardé; de tout mon cœur, mais je voudrois moy qu'il le fît graver en pierre et en avoir une vingtaine de pierres. Vous luy en parlerez. Adieu mon cher amy. Vous allez à la campagne, et que ne venez vous à la nôtre?
J'envoye à mr Tiriot un paquet de lettres pour être remises à quelques personnes à qui je fais présent des élémens de Neuton. Si mr Tiriot veut se charger de remettre luy même les paquets à mrs Dargenson et Dargental qui sont dans son quartier, ce sera autant de peine épargnée pour vos commissionaires.
Vous avez dû voir mon cher abbé par le mémoire qui est entre les mains de mr Cousin Le nombre et la qualité des volumes qu'on doitremettre, à mr Tiriot, à mr Dargental, à mr Dargenson. Vous remettrez ou ferez remettre par mr Cousin non seulement ces volumes spécifiez dans le mémoire, mais encor tous ceux que mr Tiriot demandera et dontil voudra faire des présents. Je me flatte que vous en donnerez aussi à ceux de vos amis qui entendent ces matières.
Je ne vous envoye que la lettre pour mr Heraut à qui vous aurez la bonté de l'envoyer avec le livre, le tout cacheté.
Voicy aussi un petit mot d'avertissement pour mr de la Roque, que l'on vous prie de faire tenir, avant de luy envoyer le livre, mais il ne faut pas que cette petite lettre luy soit rendue de ma part. C'est une galanterie avec laquelle on veut le surprendre.