De ton Bernard
J'aime l'esprit,
J'aime l’écrit
Que de sa part
Avec ta lettreTu viens de mettre.Son heureux mètre
Coulant sans art,
Brillant sans fard,Est la peinture
De la nature.
C'est un tableau
Fait par Vatau.
Sachez aussi
Que la déesse
Enchanteresse
De ce lieu ci
Voyant l'espèce
De vers si courts
Que les amours
Eux mêmes on faits,
A dit qu'auprès
De ces vers nains,
Vifs et badins
Tous les plus longs
Faits par Voltaire
Ne peuvent guère
Etre aussi bons.
Mille compliments donc à mon ami Bernard de ce qu'il cultive toujours les muses aimables. Je ne sais pas pourquoi le public s'obstine à croire que j'ai fait Montezume. La scène est au Pérou, messieurs, séjour peu connu des poètes. La Condamine mesure ce pays, les Espagnols l’épuisent et moi je le chante. Dieu me garde des siflets. Le Franc fait bien tout ce qu'il peut pour m'attirer cette aubade. Il empêche melle Dufresne de jouer. Je ne sais si le rôle est propre pour melle Gossin. Si je ne suis pas siflé, voilà une belle occasion d’écrire à mr Sinetti l'Américain. Adieu, je ne me porte guère bien. Adieu charmant correspondant.
V.
à Cirey ce 29 Janvier 1736