Le 22 févr. 1758
Prenés le fer de Melpomene,
D'Alzire, d'Idamé retracés les terreurs!
Et de vos fiers cantons la moustache hautaine
S'abaisse et se mouille de pleurs.
Prenés le miroir de Thalie!
Et vostre grave citoyen
Sous un portrait, […] le sien,
Rira de sa propre folie.
Aux tableaux de Nanine ajoutés vos crayons!
Et tous, à Paris nous croyons
Que le Démon coquet que vostre muse damne
S'enfuira, s'il est à Lausane.
Mais laissés mes raisonnemens,
Pour achever vostre Toilette:
On allume au Théâtre, et déjà la clochette
Vous rapelle au doux bruit des aplaudissemens.
Oh, qu'attentif dans la coulisse
J'écouterois vos fictions!
Sauf pourtant les distractions,
Que pouroit me donner l'actrice.
Et cette aimable D'Espinay
Que Tronchin attira, que plus que son sené,
Retiennent près du Lac et l'oncle et la nièce
Par leurs talens de toute Espèce,
Croyés qu'elle peut rendre en vos jeux aplaudis
Une mère adorable: interrogés son fils!
Consultés la candeur de sa phisionomie!
Et vous la chargerés du rosle d'une amie.
Mais qui doute, en voyant ses yeux
Pleins du feu doux de la tendresse
Qu'elle ne s'aquitast au mieux
Du Personage de maitresse.
Après la Tragédie d'Astarbe qu'on répète mde de Graffigny va donner sa comédie de la fille d'Aristide. Melle Clairon, comme vous le savés, a eu la première le courage de paroître au Théâtre sans panier: ce fut dans le Rosle d'Idamé. Cette missionaire Pathétique et touchante vient de faire un progrès marqué dans l'Etablissement de cette vérité si nécessaire du Costume. Voilà que malgré l'intérêt et la résistance des cus plats, des gros ventres, des tailles de travers, melles Fel et Danau et compagnie représentent dans Enée et Lavinie en jupes plates, il n'y a que les danseuses qui dansent seules qui tiennent bon et elles ne sont pas inflexibles &c.