[c. 15 December 1732]
Vous êtes acoutumé à me donner des leçons.
Souffrez donc monsieur que je soumette à votre jugement quelques lettres que j'ay écrites autrefois d'Angleterre et qu'on veut imprimer à Londres. Je les ay corrigées depuis peu, mais elles me paroissent avoir grand besoin d'être revues par des yeux comme les vôtres. Je vous demande en grâce de vouloir bien les lire. Je n'ose vous prier de mettre par écrit les réflexions que vous ferez. Il n'est pas juste que je vous donne tant de peine, mais j'avoue que si vous aviez cette bonté, je vous aurois une extrême obligation. J'ay choisi parmy touttes ces lettres celles qui ont le plus raport aux études que vous honorez de la préférence, non que vous n'étendiez votre empire sur plus d'une province du parnasse, mais je n'ay pas voulu vous ennuyer à la fois in omni genere. Je veux essayer votre patience par degrez. Quand vous voudrez faire encor un souper chez mr du Faÿ avec l'honnête musulman qui entend si bien le français, je seray à vos ordres, et je vous liray le temple du goust. C'est un pays aussi connu de vous qu'il est ignoré de la plus part des géomètres. Mr Neuton ne le connoissoit pas, et mr Leibnits n'y avoit guère voiagé qu'en allemand. Adieu monsieur, vous n'avez point de disciple, plus ignorant, plus docile et plus tendrement attaché que moy.
V.