1723-01-03, de Voltaire [François Marie Arouet] à Nicolas Claude Thieriot.

J’écris par cet ordinaire une lettre très pressante et très patétique à madame la maréchalle à qui je recomande vos intérêts dont j'ose me flatter qu'elle aura soin; je vous remercie infiniment mon cher amy de vos visites chez ma sœur, voiez la souvent je vous en conjure, et mettez moy un peu bien avec elle.
La nouvelle de Roussau séminariste ressemble à celle de la Fillon qui se retira il y a quelques années dans un couvent. Il me paroit que le diable n'est pas encor assez vieux pour se faire hermite.

On m'a envoié un éloge de feu Marc René par mr de Fontenelle qui me paroit tout à fait sage et plein d'esprit. Je ne sçai pas comment on en juge à Paris.

J'ai je croi achevé, et poème et remarques. J'ai composé une petite histoire abrégée de ce temps là pour mettre à la tête de l'ouvrage. J'ai fait aussi un discours au roy. Voilà à quoy je me suis occupé. La parodie de Persée n'a point aigri l'amertume que j'ai dans ma vie depuis longtemps. Je pardonne volontiers aux gredins d'autheurs ces trivelinades, c'est leur métier, il faut que chacun fasse le sien, le mien est de les mépriser. Vous ne me mandez point ce qu'ont fait les peintres; écrivez moy un peu quelque détail sur cela. Je vous envoierai incessamment un mémoire que je ferai distribuer aux juges de Bauregard. Je ne sçai si je me flatte mais je croi que vous en serez content. Faittes ma cour à Madame de Berniere. Je suis infiniment sensible à son amitié.