1725-08-01, de Voltaire [François Marie Arouet] à Nicolas Claude Thieriot.

Voilà encor une autre édition de Mariamne qui paroit d'hier et une troisième dont on me menace. Vous voiez que l'honeur qu'on a fait à la Motte d'écrire son Ines dans les représentations n'est pas un honneur si singulier qu'il le prétend. Je ne sais à cela que de donner ma pièce et d'y corriger le plus de choses que je pourai, afin que l'air de la nouvauté soit joint à la correction dont elle avoit besoin. On vient de me dire qu'il va aussi paroître une nouvelle édition du poème de la Ligue mais que mon poème sera différent de celui que vous avez vu. Je commence à en être content. C'est baucoup dire, car vous savez que je suis plus difficile sur mes ouvrages que sur ceux des autres. Je vous remercie de tout mon cœur des perquisitions faittes à Rouen. Ce n'est plus la peine d'en faire, puisque je suis assassiné d'éditions de tous les côtez.

Mandez moy je vous en prie sur le champ la demeure de mr de Gourdon de Mirabelle. Adieu, je fais mille complimens à madame de Berniere et au chevalier et à mes anciens amis de Rouen. Je vous envoierai Mariamne dès qu'elle sera imprimée. Je sors dans le moment pour la faire jouer, et pour la faire imprimer. J'ai un procez, un poème épique, une tragédie et une comédie sur les bras. Si j'ai de la santé je soutiendrai tous ces fardaux guaiement. Si je n'en ai point que tout aille au diable. Bonsoir.