1838-04-09, de Pierre-Joseph Proudhon à  Pauthier, Guillaume.

Monsieur, je me vois obligé, da partir, en toute hâte, pour Besancon, où m'appellent les événements déplorables qui se passent dans l'imprimerie dont je fais, partie comme associé. L***, mon collègue, est, en ce. moment, ou mort ou en état d'aliénation complète. Je vais donc le remplacer, et conduire notre malheureuse barque. Aussi, adieu pour longtemps, la linguistique, et la philosophie : il faut courir, au plus pressé.

J'eusse vivement désiré, Monsieur, vous voir encore; une fois avant de quitter la capitale; mais j'ose espérer que vous vous souviendrez quelquefois d'un jeune homme qui a deviné, comme par instinct, ce qu'il vous sera donné, je l'espère, de nous démontrer; je veux dire que la philosophie, doit ressortir des antiquités du langage et de. la mythologie. Je fais bon marché des prétentions que j'aurais pu revendiquer à avancer et consolider la science sociale et. philosophique; et je me croirai toujours amplement dédommagé si dans le bataillon sacré des régénérateurs, les hommes de mon pays brillent au premier rang. Je dirai quelque jour avec orgueil : j'ai connu Pauthier, je lui ai parlé. Que l'humanité grandisse, que la Franche-Comté soit radieuse et périsse ma mémoire. Que de noms plus illustres, aujourd'hui dans le néant !

J

Je vous salue, Monsieur, avec la plus vive admiration et, souffrez que je vous le dise, avec une amitié presque passionnée.

P.-J. PROUDHON.