Monsieur,
J'arrive à Paris et je me hâte de satisfaire le premier besoin de mon âme, celui d'écrire à mon bienfaiteur.
J'ay passé à Ferney les plus beaux momens de ma vie: j'y ai connu le bonheur; j'ai pu entendre le plus grand des hommes, et il m'a été permis de l'aimer.
Ce souvenir charmant sera à jamais ma consolation dans mes peines; si l'on me punit encore d'avoir dit la vérité, je subirai mon supplice sans murmure: j'ai été à Ferney; j'ai reçu ma récompense.
Et j'aurai encore long tems à vous remercier de vos bienfaits; car vous vivrés plus long tems que Fontenelle et la dernière époque de votre vie sera plus utile que la sienne au genre humain.
Daignés agréer l'hommage du profond respect et de l'éternelle reconnoissance du plus zélé de vos admirateurs.
de L'Isle de Sales
Paris ce 24 8bre [1777] Rue basse porte Saint Denys