1775-12-03, de Voltaire [François Marie Arouet] à Anne Robert Jacques Turgot.

Je sais, monseigneur, qu'il ne faut pas fatiguer les ministres de ses lettres; mais vous ne m'empêcherez pas de vous dire combien je suis pénétré de reconnaissance de ce que vous daignez faire pour mon pauvre petit pays de Gex.
Je ne doute pas que nos états n'aient les mêmes sentiments que moi.

Je me flatte que vous êtes quitte de votre accès de goutte; je vois avec la même joie que vous êtes délivré de je ne sais quels petits frondeurs qui osaient s'élever contre le bien que vous faites. Ces chenilles qui rongeaient les feuilles sont obligées de respecter les fruits.

Je ne jouirai pas longtemps du nouveau et grand spectacle que vous donnez à la France. Il sera cher à la postérité, et je mourrai avec la consolation d'en avoir vu les commencements.

Agréez le tendre respect, l'attachement et la reconnaissance du vieux malade de Fernei.

V.