22^e janv: 1775, à Ferney

Le vieux malade de Ferney remercie bien sensiblement Monsieur de Florianet; il l'embrasse de tout son cœur; il lui écrit sur ce petit papier imperceptible pour épargner à un jeune officier très médiocrement paié, un port de Lettre considérable.

Monsieur de Florianet a eu bien des tantes, mais il n'en a point eu de plus aimable que celle d'aujourd'hui. Il verra quand il sera à Ferney une soeur de sa nouvelle tante âgée d'environ seize ans, et qui serait très digne de commettre un inceste avec Monsieur de Florianet si elle n'était pas retenue par son extrême pudeur. Il est vrai que cette pudibonde demoiselle va rarement à la messe parce qu'elle s'y ennuie, et qu'elle n'entend pas encore le Latin; mais vous la corrigerez, et vous pouriez bien abandonner pour elle Mad^lle Dupuits qui vous aimait si tendrement et si violemment. Le nez de M^lle Dupuits ne se réforme point encore, mais ses doigts acquièrent une souplesse merveilleuse au clavessin. Et si elle ne se sert pas incessamment de ses doigts pour se grater où il lui démange, il faudra qu'elle soit plus pudibonde que la soeur de vôtre nouvelle tante.

Voilà tout ce que je puis vous mander de vôtre famille, dont j'ai l'honneur d'être, un peu par ricochet. Je vous donne ma bénédiction in quantum possum et in quantum indiges.

V.