1er fév. 1773
Mon cher ami, nonseulement vous êtes mon successeur, mais vous êtes mon deffenseur.
Voicy surtout une belle occasion de me deffendre, ou plutôt de prendre le parti des honnêtes gens qui font honneur aux Lettres contre les bas coquins qui les déshonorent. J’ignore encor quel est le fripon qui a vendu à je ne sais quel libraire nommé Valade, une copie très défectueuse et très impertinente des loix de Minos, dans laquelle ce que j’ai fait de plus passable est suprimé exprès, et qui fourmille de vers dont Dieu me garde d’être l’auteur. S’il y a quelque justice dans ce monde, Mr De Sartine doit punit le voleur et le receleur. Je me borne à cette petite déclaration que je vous envoie. Je vous prie instamment de la faire mettre dans le mercure. Si vous aviez le temps d’y joindre quelques réfléxions utiles sur le brigandage honteux, sur les rapines et sur les calomnies qui règnent chez la canaille de la littérature, vous rendriez un grand service aux véritables gens de Lettres, et surtout à vous même. Prenez garde mon cher successeur qu’il ne vous en arrive autant qu’à moi. Vous avez déjà éprouvé de quoi la rage de L’envie est capable. Méritez toujours cette envie, mais écrasez la.
Je vous embrasse tendrement.
V.
Pouriez vous me dire quel est le compilateur de L’almanac des muses?