2^e x^bre 1772

Mon cher ange, on dit partout qu’il y a beaucoup de fermentation dans vôtre fromage de Parmesan; je me flatte que ces petites secousses n’iront pas jusquà vous.

Je n’ose vous parler du tripot de La Crête, pendant que vous êtes occupé sans cesse des affaires de L’Italie Lombarde. Cependant, si vous aviez quelque moment de loisir, je vous dirais que j’ai toujours oublié, je ne sais comment, de vous envoier une petite correction absolument nécessaire à la 3^e scêne du 4^e acte.

Du criminel Datame on va trancher le sort.

Il faut mettre

D’un barbare étranger on va trancher le sort.

J’étais convenu depuis longtems avec vous qu’au nom de Datame le bon vieillard Azémon devait montrer une surprise et une douleur qu’il ne manifestait point du tout. Vôtre critique était très juste; je vous demande bien pardon de ma négligence.

M: Le M^al De Richelieu m’a écrit qu’il protégeait beaucoup cette Crete, mais j’ignore ce qu’il fait. Je ne sais quel rôle joue Molé, je sais encor moins quand la pièce sera représentée; on ne m’a averti de rien excepté de la cabale fréronique et Beaumellique, qui prépare, dit-on, ses batteries avec tout l’art de la guerre. Le jour du combat amusera Paris. Pour moi je resterai tranquile au milieu de mes manufactures qui ne laissent pas de m’embarasser beaucoup, et peut être plus que ne pourait faire à Paris une Tragédie. J’attendais de M^r le controlleur général une justice qu’il m’a refusée avec une extrême politesse. C’est une chose bien étrange qu’il me refuse mon propre bien de patrimoine dont je ne fesais usage que pour servir l’état. Celà est bien pis qu’une cabale d’auteur!

Je baise toujours les ailes de mes deux anges.

V.