à Ferney 10e 7bre 1772
En voicy bien d’une autre, Monseigneur; il court une Lettre insolente, éxécrable, abominable, d’un abbé Pinzo au Pape.
Je n’ai jamais assurément entendu parler de cet abbé Pinzo; mais des gens remplis de charité m’attribuent cette belle besogne. Cette calomnie est absurde, mais il est bon de prévenir toute sorte de calomnie.
Je demande en grâce à vôtre Eminence de vouloir bien me mander s’il y a en effet un abbé Pinzo. L’on m’assure qu’on a envoié cette Lettre au Pape comme étant mon ouvrage. Je révère trop sa personne, et je l’estime trop pour craindre un moment qu’il me soupçonne d’une telle sottise. Mais enfin, comme il se peut faire qu’une telle imposture prenne quelque crédit dans Rome chez des gens moins éclairés que sa sainteté, vous me pardonnerez de vous en prévenir, et même de joindre à cette Lettre de témoignage de Monsieur le Résident de France à Genêve.
Le dangereux métier d’homme de Lettres expose souvent à de telles imputations. On dit qu’il faut prendre le bénéfice avec les charges, mais icy le bénéfice est du vent, et les charges sont des épines.
Mon très ancien, très tendre et très respectueux attachement pour Vôtre Eminence, me fait espèrer qu’elle voudra bien m’ôter cette épine du pied, ou plutôt de la tête, elle est bien sûre de mon cœur.
V.
Je soussigné certifie que M. de Voltaire m’a fait voir aujourd’hui une lettre datée d’une Campagne près Paris du 21 août 1772 contenant diverses choses particulières et à la fin ces mots, ‘Le pape a fait enfermer un abbé Pinzo, il court ici une lettre de cet abbé à sa ste &c. et que sur une feuille séparée de la même écriture est la lettre dudt abbé Pinzo telle qu’elle a été imprimée, certifie de plus que personne ne connoit à Geneve cet Abbé Pinzo et que tous les genevois ont témoigné une indignation marquée de cette lettre vraye ou supposée. Fait à Genève, le 9 septembre 1772.
Hennin, résident, pour le roi