1771-04-27, de Voltaire [François Marie Arouet] à Mathieu Henry Marchant de La Houlière.

Ce qui fait que j’ai été plus d’un mois sans vous écrire, mon cher brigadier, c’est que, non seulement je suis très malade, mais je suis aveugle.
Il y a six semaines qu’une fluxion horrible sur les yeux m’a privé de la vue. Il faut savoir souffrir et mourir.

Vous savez l’installation du nouveau parlement de Paris. Monsieur le chancelier y a fait un discours admirable. Les audiences se tiennent régulièrement avec un concours innombrable de peuple. Mon autre neveu, l’abbé Mignot, est doyen des conseillers clercs et a un grand crédit dans son corps.

Les parlements de province font les méchants et ne sont pas dangereux. Le roi sera le maître et doit l’être.

Vous êtes très mal informé si vous croyez que le duc de Choiseul rentre dans le ministère.

Pour de l’argent, on n’en donne à personne. J’ai racheté une petite frégate du roi qu’on avait saisie en Savoie, sur le lac de Genève, pour dettes criardes. On ne m’a pas seulement remboursé.

Cela dégoûte de soutenir l’honneur du pavillon de France.

Adieu; si je vais trouver ma nièce Florian, je lui ferai vos compliments. Je les fais à toute votre famille.