1770-02-16, de Pierre Michel Hennin à Voltaire [François Marie Arouet].

Vous sçavez sans doute déjà monsieur, ce qui s'est passé hier ici.
En tout cas le porteur pourra vous en dire quelque chose. On a arrêté Ausieres et fait enlever ses papiers. J'entens dire qu'il y avoit beaucoup de vos Lettres. Sans doute on va faire beau bruit de cette correspondance. Je crois au reste que la voix publique ne sera pas pour ceux qui ont engagé le Conseil à faire prendre les armes contre des gens qui n'avoient sûrement pas envie d'attaquer puisqu'ils ne se sont pas même deffendus. Au premier moment où je serai libre j'aurai l'honneur de vous voir. Je ne mande rien à M. le Duc sur ce qui vous touche parce que je n'en vois pas l'utilité et que je ne le sais qu'imparfaitement. Ce ministre se soucie fort peu de toutes les querelles genevoises et je les vois aussi tranquilement que lui. Il me fâche seulement que nous ne nous soyons pas mis en état d'en profiter, car les pauvres natifs, battus, baffoués et désormais réduits à un état pire que celui qu'ils supportoient à peine ne resteront vraisemblablement pas dans leur hargneuse patrie.

Vous connoissez M. mon tendre et inviolable dévouement.

Mes respects je vous prie à Mme Denis.