1767-10-01, de Voltaire [François Marie Arouet] à François de Chennevières.

Il est vrai, mon cher confrère, qu'il a couru des bruits ridicules.
Une parente de mr le duc de Choiseul a daigné même venir m'en instruire dans ma retraite. Vous savez qu'il suffit d'un homme malintentionné ou mal instruit pour répandre les rumeurs les plus odieuses. Il n'y avait pas le plus léger fondement à tout ce qu'on a débité; d'ailleurs je compte absolument sur les bontés de mr le duc de Choiseul qui me fait l'honneur de m'écrire quelquefois de sa main. Mr le duc de Praslin et lui sont mes deux protecteurs très constants, et je crois d'ailleurs mériter leur protection et les bontés du roi par ma conduite. Si tous ceux qui habitent leurs terres faisaient ce que je fais dans les miennes, l'état serait encore plus florissant qu'il ne l'est. J'ai défriché des terrains considérables, j'ai bâti des maisons pour les cultivateurs, j'ai mis l'abondance où était la misère j'ai construit des églises. Mes curés, tous les gentilshommes mes voisins ne rendent pas de moi de mauvais témoignages et quand les Freron et les Pompignant voudront me nuire, ils n'y réussiront pas. Je vous remercie tendrement de votre attention et de la lettre de mon chevalier. Nous vous embrassons tous, vous et la sœur du pot.