1775-12-05, de Voltaire [François Marie Arouet] à Edme Béguillet.

Un petit accident monsieur qui m'arriva il y a un mois et qui a eu des suites, m'a empêché de vous remercier plus tôt de votre lettre du 26 8bre.
Je croirais avoir beaucoup à m'instruire en lisant votre ouvrage et surtout ce que vous avez écrit sur la Bourgogne; mais pour des libraires de Geneve qui donnent aux auteurs le prix de leurs travaux, je n'en connais point &c.

A l'égard de ma chétive terre aux confins de votre Bourgogne je ne crois pas qu'il y ait bien des gens qui soient curieux de savoir que j'y ai trouvé quarante-neuf gueux mangés des écrouelles et des commis des fermes et qu'il y a aujourd'hui douze cents personnes à leur aise faisant un trafic de quatre cent mille francs par an; que j'ai eu le bonheur de défricher des terrains incultes et de faire venir deux épis de blé où il n'y en avait qu'un; qu'enfin j'ai obtenu du ministère l'affranchissement de l'esclavage où nous tenaient messieurs des fermes; j'en souhaite autant à tous les bons cultivateurs du royaume et à vous monsieur un grand débit de votre ouvrage instructif.

J'ai l'honneur d'être avec tous les sentiments que je vous dois, monsieur, votre &c.

Le vieux malade de Ferney V.