27 juillet 1767
Il a été avéré, mon cher monsieur, que c'est La Beaumelle qui me fit écrire la lettre anonyme dont je me plaignis il y a trois mois.
M. le comte de St Florentin l'a fait avertir qu'on le remettrait dans un cul de basse fosse s'il continuait ce manège. Il est bien triste pour moi que cette aventure m'ait privé du bonheur de m'approcher de vous.
Voici le 3e chant de la très ridicule guerre de Genève. Je crois qu'on m'a volé le second. Un misérable capucin très digne, s'étant échappé de son couvent en Savoye et s'étant réfugié chez moi m'a volé au bout de deux ans des manuscrits, de l'argent et des bijoux. Son nom est Bastian; il s'appelait chez moi Ricard. Il porte encore un habit rouge que je lui ai donné. Il est à Lyon depuis quelques jours; c'est lui probablement qui a fait courir ce second chant. Il faut l'abandonner à la vengeance de st François d'Assise.
Savez vous que le roi d'Espagne a mandé au roi de France que les jésuites avaient fait un complot contre la famille royale? Voilà d'étranges gens! et la religion est une belle chose. On m'a mandé des frontières d'Espagne, il y a longtemps, que les jésuites n'étaient pas les seuls moines coupables. Ils ont été jusqu'à présent les seuls punis; espérons en la justice de dieu sur toute cette abominable racaille.
Ne pouriez vous point, monsieur, vous faire informer secrètement s'il n'y a point quelque négociant protestant à Beaujeu, ou même quelque prédicant secret? S'il y en a un à Lyon comment s'appelle-t-il? comment pourrais je parvenir à avoir une liste des négociants languedochiens protestants qui sont à Lyon? à qui pourrais je m'adresser?
Le prétendu Pierre III commence à faire du bruit dans le monde mais il n'en fera pas longtemps; il ressemblera aux ouvrages nouveaux. On rapporte lundi l'affaire des Sirven.
V. t. h. s.
V.