14 février 1767
Probablement mon grand peintre tragique commencera les répétitions des Scythes dans le temps qu'il recevra ma lettre.
Je vous avertis, mon cher ami, que je fais partir aujourd'hui, à l'adresse de m. le duc de Praslin, un nouvel exemplaire des Scythes, marqué A B, dans lequel vous trouverez encore quelques petits changements fort légers. Cette copie est chargée de notes qui disent aux acteurs dans quel esprit la pièce a été composée.
Le rôle d'Obeide ne sera point du tout difficile si l'actrice veut seulement jeter un coup d'œil sur ces notes. Je suppose que m. Molé sera en état de jouer Indatire qui n'est point du tout un rôle fatigant. Je vous prie de lui dire combien je m'intéresse à sa santé. Je crois qu'en général la pièce favorise assez le jeu des acteurs. Il y a plusieurs morceaux qui ne demandent que de la simplicité, mais je vous avoue que je ne saurais souffrir cette familiarité comique qu'on introduit quelquefois dans la tragédie, et qui l'avilit ridiculement au lieu de la rendre naturelle.
Je ne croyais pas à mon âge donner encore une pièce au théâtre; mais quand on est soutenu par vos talents, il n'y a rien qu'on ne puisse hasarder.
Je pense que vous donnerez le rôle d'Obeïde à mlle Durancy. Je vous prie de l'embrasser pour moi des deux côtés, si elle veut bien le souffrir.
V.