1767-02-10, de Voltaire [François Marie Arouet] à Albrecht Friedrich von Erlach.

Monsieur,

Je crois remplir mon devoir, et je satisfais en même temps mes sentiments respectueux pour vôtre gouvernement en avertissant vôtre Excellence des Libelles diffamatoires que quelques séditieux, partisans secrets de Jean Jaques Rousseau font imprimer journellement à Yverdun au mépris de toutes vos loix.
Ces libelles sont plus dangereux dans ces temps de fermentation que dans tout autre. On m'avertit que c'est le Professeur Felici qui les fait imprimer.

Il m'est tombé une feuille d'un de ces libelles entre les mains avec une Lettre d'un garçon imprimeur nommé La Roche, qui est emploié par ce Professeur Felici. Ce garçon qui paraît honnête, semble indigné lui même des manœuvres auxquelles on l'emploie, et mérite par là probablement vôtre protection.

Je me flatte que vôtre Excellence me saura gré de ma démarche. Vôtre gouvernement et tous les particuliers ont intérêt que de tels délits soient réprimés. Je n'oublierai jamais les bontés dont j'ai été honoré dans vos états.

J'ai l'honneur d'être avec beaucoup de respect

Monsieur

De vôtre Excellence

Le très humble et trés obéïssant serviteur

Voltaire