8e xbre 1766
Je vous renvoie, Monsieur le Marquis vôtre Lettre à Mr Le comte de Périgord que vous avez bien voulu me communiquer.
J'en ai tiré une copie selon la permission que vous m'en donnez. Cette Lettre est bien digne d'une âme aussi noble et aussi généreuse que la vôtre. Elle est simple, et c'est le seul stile qui convienne à la vérité quand on écrit à ses amis. Tous les faits que vous raportez sont incontestables. Je ne doute pas que Mr Lecomte De Périgord ne trouve fort bon que vous lui adressiez cette Lettre, et que vous la rendiez publique. Pur moi, je vous avoue que je n'affecte point avec vous une fausse modestie, et que je vous ai une très grande obligation.
Le livre du Jesuite Nonotte vient d'être réimprimé sous le nom d'Amsterdam, mais l'édition est d'Avignon. Les partisans des prétentions ultramontaines soutiennent ce livre; mais ces opinions ultramontaines qui offensent nos Rois et nos parlements, n'ont pas un grand crédit chez la nation. C'est servir la religion et l'état que d'abandonner les sistèmes Jesuitiques à leurs ridicules.
Vôtre Lettre à Mr le comte de Périgord, m'a tellement échauffé la tête et le cœur que je vous ai répondu en vers par une ode, dont voici une strophe:
Voicy encor une autre strophe de cette ode:
Je crois que Mr Le Duc de Choiseuil ne sera pas mécontent de ces derniers vers. Il daigne toujours m'aimer; il m'honore quelquefois d'un mot de sa main.
J'aurai l'honneur de vous envoier l'ode entière dès qu'elle sera mise au net, et je la ferai imprimer à la suitte de vôtre Lettre. Je serai enchanté de joindre vôtre éloge à celui de mr Le Duc De Choiseuil. Celà paraîtra en même temps que le mémoire des Sirven, dont les avocats ne manqueront pas de vous envoier quelques éxemplaires.
Vous pourez faire publier vôtre Lettre et L'ode à Bordeaux, pendant que je la publierai à Genêve. Je voudrais que vous eussiez la bonté de m'envoier tous vos tîtres, et ceux de mr Le comte de Périgord pour les placer à la tête.
J'attends vos ordres, et J'ai l'honneur d'être avec les sentiments les plus respectueux et les plus tendres, Monsieur, vôtre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire