1766-11-20, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jacques Lacombe.

Je reçois vôtre paquet, Monsieur.
Il y a à la page 152, ligne 14, procrivit pour proscrivit. Je me souviens qu'il y avait aussi quelques fautes dans la pièce. Je ne peux vous les indiquer parce que j'ai envoié l'ouvrage au Roi de Prusse qui m'avait demandé si je ne pouvais pas lui faire avoir quelques vers nouveaux de Paris.

La justification de Jean Jaques est d'un sot. Il méritait au moins d'être déffendu par un fou qui eût de l'esprit.

Quand vous aurez achevé vôtre besogne je vous suplierai de vouloir bien, Monsieur, m'en envoier deux éxemplaires que je garderai fidèlement. L'un est pour ma nièce, l'autre est pour moi.

Je vous demande encor en grâce de ne point ouvrir vôtre glacière au public de plus de quinze jours après l'impression. La raison en est qu'on va donner au théâtre quelque chose de fort chaud à ce que l'on dit, et que la glace du triumvirat pourait trop refroidir le public sur les petits pâtés tout chauds qu'on va lui donner. Je vous confie tout cela sous le plus profond secrêt. Je crois qu'il est de vôtre intérêt de temporiser aumoins quinze jours, et peut être trois semaines. Vous sentés bien que si les pâtés tout chauds étaient mangés avec plaisir vôtre fromage à la glace serait bien mieux reçu.

La Lettre à mr Le docteur Pansophe n'est assurément point de moi; on m'assure qu'elle est de l'abbé Coyer, et je crois y reconnaître son stile. Elle est fort jolie, à quelques longueurs et quelques répétitions près, mais il est fort mal à l'abbé Coyer de mettre sous mon nom une chose que je n'ai point faitte. C'est un procédé qui me fait beaucoup de peine. Je vous prie très instamment de désabuser ceux qui croient que cette Lettre est de moi.

Recevez mes très tendres amitiez, Monsieur,

V.
v. t. h: o. st