1766-11-16, de Hugues Maret à Alexis Piron.

… Quand on réfléchit à l'usage que vous faites de vos talents et à l'abus qu'on peut reprocher à m. de Voltaire de faire des siens, le parallèle n'est pas plus à l'avantage de ce dernier que quand on compare la Métromanieà Nanine, Gustaveà Sémiramis, à Tancrède, etc., etc.

Les anagrames du nom factice de cet homme de lettres qui a su changer l'Hippocrène en Pactole et le Parnasse en hôtel des fermes; ces anagrammes, dis je, ont été très goûtées; elles volent ici de bouche en bouche; tout le monde est d'accord sur la justesse de l'application de la première: je veux dire du Volitare; mais il n'est personne que la seconde n'ait singulièrement frappé. Ses partisans, même les plus outrés, sont convenus de l'étendue de sa jalousie. Vos propos relatifs à sa nouvelle philosophie et à ses prétentions ont fait éclater de rire presque tous ceux auxquels j'ai lu votre lettre, et j'ai vu des voltairiens qui, moitié haut, disaient: 'Sur cet article, il est inexcusable, et m. Piron n'a pas tort'. Je crois que dans leur intérieur ils avouaient que vous aviez très grande raison; mais leur approbation un peu jésuitique était un hommage à la vérité qui leur coûtait assez pour qu'on dût s'en contenter….

Maret