1766-08-21, de Théodore Tronchin à Charles Bonnet.

… On nous fait espérer que tout ira bien, c'est à dire que nos Médiateurs termineront leur besogne, la déclaration préliminaire en ayant suffisamment imposé pour qu'au moment de la sanction personne ne regimbe, de manière du moins à en arêter l'effet.
Et c'est tout ce qu'on peut demander. C'est à Dieu à faire le reste. Lui seul peut agir sur les coeurs. La manifestation de la folie & de la méchanceté de Rousseau, ne peut que nous être utile. Le mépris de sa personne rejaillira sur ses principes, & nombre de ses dévots s'en détacheront. Sa charlatanerie de vertu en avoit séduit un grand nombre. Le masque est tombé, l'homme reste, le héros est évanoui. L'autre méchant fou, son antagoniste, perd aussi beaucoup de ses amis. Ces deux hommes en vérité font à la vertu bien beau jeu. La coupe enchanteresse qui a enyvré tant de buveurs perdra sa force, et l'on finira par rougir de s'être enyvré. Si ces deux hommes malheureusement eussent pû conserver une apparence de sagesse, que de mal n'auroient-ils pas fait? Soyez sûr, mon bon ami, & dites le à qui doit l'entendre, qu'aucun de ces deux hommes n'est personnellement à craindre. Ils ont perdu tout crédit, & ne peuvent pas l'ignorer. L'homme de Fernex en a tous les jours des preuves bien mortifiantes. Qu'il prenne garde à lui. Il a un ennemi bien redoutable en Mr Paquier, qui n'entend pas raillerie, & qui jouït à la Cour et dans son Corps de la plus haute considération. Non mittet cutim. Je sais ce qu'il m'en a dit….