1766-04-30, de Voltaire [François Marie Arouet] à Pierre de Taulès.

Mon cher monsieur, le frère d'Auziere et le sr Bourlier natifs viennent à moy, ainsi que sindics à qui j'ay prêté de l'argent, conseillers qui ont fait de bons marchéz avec moy, citoyens à tête chaude, et autres, y sont venus.
J'ay préché la paix à tous, et je suis toujours resté en paix chez moy. Tout cecy est une comédie dont vous venez faire le dénouement. Dauziere est en prison, et vous protégez les malheureux. Je ne connais point les rubriques de la ville de Calvin et je ne veux point les connaitre. Une vingtaine de natifs est venue me trouver comme les poissardes de Paris qui me firent autrefois le même honneur. Je leur forgeai un petit compliment pour le Roy qui fut très bien reçu. J'en ay fait un pour les natifs, qui n'a pas été reçu de même. C'est apparemment que mrs des sont plus grands seigneurs que le Roy. J'ignore si les poissardes ont plus de privilèges que les natifs, mais je vous demande votre protection pour de pauvres diables qui ne savent ce qu'ils font. Ce n'est pas des perruques quarrées que je parle; c'est des natifs. Tout en riant honorez ces bonnes gens de vos bontéz compatissantes, et conservez moy les vôtres.