1770-05-15, de Voltaire [François Marie Arouet] à Gabriel Cramer.

J'ai beaucoup de choses à vous dire, mon cher ami, sur vôtre édition in 4., sur tous ces petits vers qui vous tiennent tant à coeur, indignes du public, de vous et de moi.
Il faudrait aumoins les retoucher pour les rendre moins fades. Je voudrais bien que nous pussions nous parler; vôtre métier de major est bien inutile et bien triste. Ne faittes plus la guerre à vos compatriotes. Le Roi prend sous sa protection tous ceux qui viennent s'établir au païs de Gex, sindics, bourgeois, natifs, habitans. Quiconque voudra bien venir sera aussi bien reçu, aussi libre que vous l'êtes à Tourney. Chacun y poura exercer en paix ses talents et sa religion. On sera éxempt de touts droits, de toute imposition. On trace aujourd'hui les rues de Versoi. Si vous voulez y bâtir une maison, il ne tient qu'à vous. Prenez vous y de bonne heure.

En attendant, je vous demande en grâce de faire aller vîte nôtre Enciclopédie.