22 novb [1765]
J'ay lu Monsieur les papiers que vous m'avez fait l'honneur de m'envoier.
Ils m'ont paru écrits avec sagesse, autant qu'avec clarté. J'ose penser qu'il ne serait pas difficile de concilier les esprits sur les points qui sont discutez dans ces mémoires. L'objet le plus important si je ne me trompe et qui semble rencontrer des difficultez insurmontables est le droit au quel on a donné le nom de négatif. La médiation n'a voulu sans doute ny avilir l'autorité du conseil ny enchainer la liberté des citoiens. Tout l'esprit de vos loix consiste dans le maintien de ces deux objets.
Hier après votre départ de Ferney je fis lire les articles de la médiation à l'avocat qui avait diné avec nous. Il trouva sans hésiter que la lettre de la loy n'était pas en faveur des représentants. Il faut donc trouver quelque tempérament qui concilie la lettre et l'esprit. J'ay été fort surpris que dans sept cent citoyens vous ne pussiez pas compter trois jurisconsultes. Peutêtre y a t'il un remède à cette étrange disette. Je vous proposerai mes faibles idées la première fois que j'auray l'honneur de vous entretenir. Vous savez que je n'ay et ne puis avoir en vue que le bien public. Vos sentiments m'ont paru aussi purs que les miens. Vous m'éclairerez beaucoup mais vous ne pourez guères augmenter l'envie que j'ay de voir votre république tranquile et heureuse non plus que les sentiments d'estime que vous m'avez inspirez.
Permettez moy d'y joindre ceux de l'amitié sans cérémonie. V. t. h. ob. str
V.